Sainte-Cécile-de-Cos est une chapelle isolée du territoire du Tech, dans le Vallespir. C'est de nos jours un édifice religieux en assez bon état, mais surtout il est privé, il est sur le terrain d'un mas (Le mas de Cos) et n'est pas ni visitable, ni même visible de l'extérieur. Le site est un ancien village abandonné, ou pour être plus précis un lieu de vie où s'est construit une chapelle. Durant le haut Moyen-âge des pionniers chrétiens venant du Nord de la France avaient construits ces chapelles et s'étaient installés tout autour dans des maisons d'abord en bois, puis, plus tard, en pierre. C'était là le point de départ de nombreux villages, mais ici le site n'a jamais vraiment grandi et a fini par être abandonné, d'où l'existence de la chapelle, qui a été restaurée, et l'absence de maisons. Seul le mas est resté.
Aussi il n'y a pas grand chose à dire de ce lieu. Le paysage est essentiellement composé d'alternance de zones boisées et de champs, preuve de l'exploitation des terrains alentours.
Histoire
L'histoire de cette paroisse commence en 881. A cette date Charlemagne reconnaît à Siniefred, abbé d'Arles
(sur Tech), la possession de la "Cella de Cotso". A cette époque reculée, les territoires venaient tout juste d'être reconquis sur les sarrasins. Les
soldats ayant précédés les moines, on vit la région se couvrir d'abbayes, d'églises, de chapelles éparpillées partout au fond des vallées, sur les pics,
dans la plaine, au milieu des forêts, tout ça dans l'idée de former une assise religieuse pour la population.
C'est dans cette idée que fut construite une minuscule chapelle consacrée à Ste Marie, chapelle à laquelle on adjoint un bâtiment destiné à servir
de lieu de repos pour les pèlerins. En effet, descendant de la vallée de la Têt, puis Baillestavy,
Valmanya et le col de Tournère, les pèlerins avaient pour habitude de descendre sur St Guillem, puis Ste Marie avant de
partir de l'autre côté de la vallée vers Notre Dame du Coral, puis Ste Marguerite d'Arès et
poursuivre leurs périples en Espagne vers St Jacques de Compostelle.
Au XIIe siècle la situation de la région se calma. Les guerres s'arrêtèrent un temps et la population grandit. Il fallut alors agrandir Ste Marie
pour accueillir la nouvelle population. Une autre chapelle fut construite, plus vaste. Pour avoir une idée de la taille de la 1ere chapelle, il faut
savoir qu'elle servit d'abside à la deuxième. La consécration de la nouvelle chapelle fut faite le 12 des calendes de novembre 1158 à la demande de
l'abbé Raymond du monastère d'Arles. C'est à cette date que la paroisse changea de Sainte patronne, passant de Ste Marie à Ste Cécile.
Les habitants de la paroisse était placées comme tous les autres villages sous la protection d'un religieux pour le spirituel (le curé) et d'un laïc
pour le temporel (le seigneur). Ste Cécile avait pour particularité d'avoir la même personne, le curé, pour remplir les deux fonctions. Or, le curé
rendait compte à l'abbaye d'Arles, ce qui la rendait véritable seigneur de Ste Cécile. Tant que cette situation a perduré, le village s'est développé.
Nous verrons plus loin qu'à la séparation des pouvoirs fut déclenchée la chute du village. Toujours est-il que l'abbé pu imposer le fait que le curé
ne soit pas placé sous l'autorité du battle.
Lors de la consécration de la chapelle, l'abbé donna au curé le bâtiment des pèlerins pour qu'il devienne le presbytère. Tout contre le sanctuaire
se trouvait l'ancien cimetière, aujourd'hui entièrement disparu. Il fallut également délimiter la paroisse. L'abbé choisit de le faire sur les limites
suivantes :
- à l'Est, la serre des Maures,
- au Sud, le Tech,
- à l'Ouest, le ravin de Picerolas,
- au Nord, l'arrière de la tour de Cos.
Dans ce périmètre se trouvait la rue d'Amont, le village proprement dit, et les métairies de "La Font", du "Puig Rodon", de "Cos" et de "Manyacas". La
rue d'Amont était assez longue et s'étirait le long de la route nommée "royale" en 1684. Tout au bout se trouvait une clouterie dont le fer était fourni
par les nombreuses forges des alentours. Un document de 1603 nous apprend qu'il y avait trois maîtres de forges (Ginesta, Palastraga et Ribéra), mais aussi
deux forgeurs, un tisserand de lin et un tailleur de pierres. Un autre refait un état des lieux en 1678, et l'on constate qu'il ne restait plus que Ginesta
en tant que maître de forge. Il faut dire que cette famille possédait la majorité des forges du haut-Vallespir.
Ils habitaient au milieu de la rue. Parmi les autres métiers, il restait à la rue d'Amont quatre forgeurs, deux muliers, six brassiers et un meunier à farine.
Au fil du temps les métairies ont changé de propriétaire relativement souvent à cause des charges énormes qui pesaient sur elles. Les abbés d'Arles
maintenaient en effet ces charges, préférant voir les propriétés s'échanger plutôt que de perdre des revenus dont ils avaient besoin. Ces charges atteignirent
leurs apogées sous la propriété de la famille Trescases.
Cette famille parvient à faire comprendre aux abbés les méfaits de leur politique. Ils décidèrent donc de les baisser, ce qui permit à la famille Trescases,
à la fin du XVIe siècle, d'acheter les autres métairies. Au milieu du XVIIe siècle, Jean-Pierre Trescases possédait non seulement toutes les métairies, mais
aussi la moitié de la rue du village. La fonction de battle se passait de père en fils, ils étaient les vrais seigneurs de Ste Cécile. Le problème, c'était
qu'à chaque génération il fallait dédommager les fils cadets car l'aîné prenait la succession du père. Le patrimoine familial commença à se désagréger
lentement.
A la fin du XVIIe siècle l'abbaye d'Arles ne possédait sur Ste Cécile qu'un simple bénéfice, le village était maintenu par Jean-Pierre Trescases sur
demande de l'abbé. En 1716, son fils Jacques était devenu le nouveau battle. Il réussi à convaincre les derniers habitants de se joindre à ceux d'Arles
afin de ne former qu'une paroisse, et surtout de bénéficier des mêmes avantages que les habitants d'Arles.
Puis vint la révolution française. Le battle de Ste Cécile était Michel Trescases. Ce dernier demanda au directoire des Pyrénées-Orientales d'affranchir
Ste Cécile de la tutelle de l'abbaye d'Arles, ce qui fut accordé. Mais le directoire jugea le village trop petit pour former une commune et le joignit à
Arles, tout comme la vallée de la Coumelade et le village du Tech. Michel fut le dernier battle de
Ste Cécile. Il mourut en 1799 et fut enterré à côté de ses pères, dans la chapelle de la paroisse où ses restes ont été découvert récemment, puis recouvert
pour l'éternité.
Le début du XIXe siècle marqua la fin de la paroisse. Des espagnols, rebelles, envahirent le haut-Vallespir et commirent de nombreux méfaits. Parmi eux,
l'incendie de Ste Cécile, qui ne devait plus jamais être un lieu de culte. La chapelle tomba en ruine jusque dans les années 80 où un groupe de bénévoles,
dont Mr Ponsich, célèbre historien catalan, remirent en état ce qui pouvait être encore sauvé.
Cette chapelle est aujourd'hui une propriété privée.