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Biographie du Maitre de Cabestany


Le Maître de Cabestany est le nom donné à un maître sculpteur ayant exercé son activité durant la seconde moitié du XIIe siècle. "Cet illustre inconnu", pour reprendre la formule consacrée est désigné sous ce nom car tout a commencé à Cabestany.

Nous sommes en 1935. Le curé de la paroisse décide de faire rénover son église qui le méritait bien. Les travaux permirent la mise à jour d'un tympan sculpté en forme de demi cercle de 2 mètres de long sur 1 de haut. Fait de marbre blanc, ce décor était le tympan d'une ancienne porte perçée dans le mur Nord, une porte disparue et dont on a récupéré cette pièce pour orner une nouvelle porte maçonnée récemment. Il est entièrement sculpté de représentations de la vie de la Vierge.


Description du tympan de l'église de Cabestany

L'ensemble du tympan est dédiée à la Vierge. Les différentes scènes que l'on y voit ne sont pas séparées les unes des autres mais forment un ensemble sans cohérence litérale. A gauche, elle se dresse dans son tombeau à l'appel de son fils sous les yeux de deux apôtres, probablement St Pierre et St Jean. A droite, la Vierge est représentée lors de l'Assomption, entourée d'anges dont certains portent la mandorle et d'autres des encensoirs. La partie centrale est de loin la plus intéressante car elle sort complètement des canons artistiques de l'époque. Habituellement à l'époque romane on représentait au centre des scènes le couronnement de la Vierge par le Christ. Ici le thème est apocryphe : On y vot Saint Thomas, qui était absent lors de la résurrection de la Vierge, recevoir la ceinture qui entourait le corps de la Vierge, marquant ainsi le volonté de l'auteur de la sculpture de mettre en avant la réalité de la résurrection. Cette représentation est peut-être liée à un véritable acte historique, la réception de cette ceinture à Prato, en Toscane, en 1141. Le culte de cette ceinture, preuve de la résurrection de la Vierge, fut à l'origine de grand pélerinage à Prato durant tout le Moyen-âge et de nos jours encore ce culte est ancré dans la tradition populaire locale.

Nous avons donc sur le tympan du maître de Cabestany une représentation apocryphe originale qui en fait tout l'intérêt.


Les caractéristiques du tympan

Ce qui a étonné les spécialistes de l'époque réside aussi dans les caractéristiques même de la sculpture, sa façon de représenter les personnages. Les mains sont immenses, les yeux sont marqués par des trous faits au trépan. Même les plissés de vêtements sont caractéristiques.

De façon plus précise on remarque que la scène est composée sur deux plans, là aussi c'est une originalité. Les personnages ont tous un front bas, des traits durs caractérisés par des arcades sourcillières saillantes, des yeux globuleux, un nez saillant et des oreilles décollés très grandes. Par contre le menton n'est quasiment pas représenté. Curieusement le personnage du Christ est sculpté de façon assez brutale alors que la Vierge, elle, a subi de nombreuses finitions destinées à adoucir ses traits.


Tympan de l'église du maître de Cabestany

Le tympan de l'église de Cabestany


La diffusion du style du maître

Ce type de sculptures se retrouvent dans d'autres sites, déjà connus ou à découvrir par la suite. On en a recensé 121. Un style si particulier est forcément issu de la même personne : le Maître de Cabestany s'est dévoilé...

La plus proche contribution de l'artiste est celle que l'on trouve au Boulou. Dans ce village plus au Sud se trouve un portail original dans sa structure et son exécution. Ce portail magnifique est fait d'un lourd linteau surmonté d'un tympan en trois parties, complètement plate et donc non sculpté. Le linteau est supporté par deux colonnes hautes et fines englobées dans un massif en pierre, avec des chapiteaux sculptés un peu à la façon de ce que l'on trouve à Corneilla-de-Conflent. Mais ce qui est intéressant dans cette pièce, c'est surtout l'étroite corniche qui la surplombe. Elle est sculptée à la façon du maître de Cabestany d'une série de scènes de l'enfance du Christ. Les traits, la façon de sculpter sont similaires, ce qui permet de rapprocher les deux oeuvres. Il y a juste une différence d'assurance dans l'exécution, comme c'est le cas sur une pièce d'un autre lieu, le monastir del Camp, à Passa. Là-bas le trait de la sculpture du maître est légèrement moins marqué, comme si il s'agissait d'une oeuvre de jeneusse. Par ailleurs l'histoire nous apprend que l'église qui possède ce portail appartenait à la communauté de chanoines présente sur place et dont la présence est attestée dès 1116, ce qui correspondrait à l'époque de la création du tympan de Cabestany.

C'est ainsi que l'on peut retrouver une trace de l'artiste dans l'Aude, le département voisin. L'un des chapiteaux de l'église de Rieux-Minervois possède ce style si caractéristique, il pourrait s'agir là aussi d'une oeuvre de jeunesse. L'abbaye de Lagrasse a aussi une de ses oeuvres, tout comme l'église de St Hilaire qui possède un magnifique sarcophage en marbre blanc sculpté de sa main. Enfin et toujours dans l'Aude le maître de Cabestany a laissé des corniches sculptés sur l'église de St Papoul. La suite de sa carrière sera faite hors de l'actuelle France, puisqu'on retrouve son travail à l'abbatiale St Pierre de Rodes, en Espagne, plus exactement en Catalogne. Puis en Navarre, pour un travail sur un linteau et un tympan de la localité d'Errondo (actuellement, cette oeuvre est au musée des cloîtres de New-York), et enfin en Toscane, sur l'abbaye St Antimo. Les comparaisons stylistiques de chacune des oeuvres cités prouvent leurs exécution par le même atelier, sans aucun doute possible.

Il faut dire qu'un atelier de sculpture n'était pas formé d'une seule personne, mais c'était plutôt une école où s'exerçait les mains appelées à devenir expertes dans leurs domaines d'exécution. Ainsi à chaque déplacement c'était toute une caravane d'hommes et de matériels qui s'installait. Et des changements de lieux, il y en eu quelques uns, comme on vient de le voir.

Voici une liste des lieux où l'on retourve les travaux du maître de Cabestany :

En Roussillon

  • Cabestany, l'église Notre Dame des Anges
  • Passa, au Monastir del Camp
  • Le Boulou, l'église Ste Marie

En Languedoc

  • Rieux : l'église Ste Marie (dans le Minervois)
  • Abbaye Ste Marie d'Orbieu, à Lagrasse
  • Abbaye Ste Hilaire d'Aude,
  • Abbaye St Papoul de Narbonne
  • Palais des archevêques, à Narbonne

En Catalogne

  • Eglise St Pere de Galigants à Gérone
  • Eglise Sant Esteve d'En Bas
  • Monastère Sant Pere de Rodes à El Port de la Selva

En Navarre

  • Eglise Errondo
  • Eglise de Villaveta

En Toscane

  • abbaye Sant Antimo à Montalcino
  • Museo d'Arte Sacra de San Casciano Val di Pesa
  • Cloître de la cathédrale de Prato

Le centre d'art roman du maître de Cabestany

Le maître de Cabestany a eu une telle importance dans l'activité sculpturale de l'époque romane qu'un musée lui a été consacré. C'est même plus que ça puisqu'il s'agit d'un "centre de sculpture romane". Il s'agit d'un ancien bâtiment du centre ville de Cabestany, juste à proximité du parc et du centre culturel Jean Ferrat. Vous y serez accueilli avec professionnalisme par des personnes qui pourront vous guider dans l'exposition. Cette dernière apport de nombreuses précisions sur l'art roman, ses modes d'expression et évidemment celle, particulière, de la sculpture, et sur l'extension du style du maître de Cabestany à travers l'Europe.



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